La cession d’une filiale en difficulté est un outil classique pour les groupes de sociétés souhaitant se recentrer sur leurs activités rentables. Mais lorsque le repreneur échoue rapidement et que la filiale est liquidée, une question revient systématiquement : la société mère peut-elle être tenue responsable ?

Une cession de titres, pas une garantie économique

Pour rappel, céder une filiale déficitaire revient juridiquement à transférer des titres sociaux. Dès lors, le repreneur devient seul responsable de la gestion et de l’avenir de l’entreprise acquise. Aucune obligation de vérifier la viabilité du projet de reprise ne pèse sur la société mère, en application du principe de liberté contractuelle. En d’autres termes, la maison mère n’est pas le garant implicite de la pérennité de la filiale.

Les deux limites majeures : faute de gestion et fraude

Ce principe connaît toutefois deux exceptions. La responsabilité de la société mère peut être engagée si elle a commis une faute de gestion avant la cession, par exemple en imposant une politique commerciale ruineuse, en opérant des transferts financiers abusifs ou en privant la filiale de ses moyens. La fraude constitue l’autre limite : une cession réalisée dans le seul but de se débarrasser artificiellement d’une filiale ou organisée avec un acquéreur notoirement défaillant peut être requalifiée et donner lieu à des sanctions.

Les salariés, acteurs secondaires mais pas exclus

En procédure collective, seul le mandataire judiciaire agit dans l’intérêt collectif des créanciers. Toutefois, les salariés conservent la possibilité d’engager une action individuelle s’ils prouvent un préjudice personnel distinct, comme la perte de leur emploi, et un lien direct avec une faute de la société mère. Si ce type de recours reste rare et difficile, il n’est pas totalement exclu, notamment en cas de comportements manifestement abusifs.

Ainsi, la société mère n’a pas à vérifier la solidité du repreneur. Néanmoins, la documentation rigoureuse du processus, la transparence dans le choix du cessionnaire et l’implication des instances représentatives du personnel demeurent essentielles pour prévenir les contentieux. L’équilibre est clair : liberté de céder une filiale déficitaire, mais vigilance accrue face aux risques de faute ou de fraude.