Les statuts régissent les rapports entre les associés, mais également les rapports à l’égard des tiers. Ils peuvent être personnalisés en fonction des besoins de la société et des souhaits de ses associés, notamment en incluant une clause d’agrément pour tous les nouveaux associés, même lorsque les parts sociales ont été reçues par succession
Une telle clause permet aux associés existants de contrôler toute entrée au sein de leur capital puisque chaque nouvel associé devra être approuvé par les associés en place. Néanmoins, les conséquences d’un refus d’agrément ne sont pas négligeables, ainsi que l’ont rappelé les hauts magistrats de la Cour régulatrice.
Une SARL était détenue par trois associés dont l’un est décédé, laissant deux filles pour lui succéder. En application d’une clause statutaire d’agrément, l’assemblée générale extraordinaire de la société a refusé d’agréer les héritières comme associées au titre des parts héritées de leur père.
Désigné par le président du tribunal de commerce sur le fondement de l’article 1843-4 du Code civil, un expert a déterminé la valeur des droits sociaux hérités à hauteur de 5 905 200 €. Malgré cette estimation, les associés survivants n’ont pas acquis ou fait acquérir les parts dans le délai prévu par l’article L. 223-14 du Code de commerce, les héritières les ont donc assignés en rachat forcé de leurs droits.
Par un protocole transactionnel, les héritières reconnaissaient avoir été agréées en qualité d’associées de la SARL et s’engageaient à renoncer à toute action ou toute contestation relative à cette qualité en contrepartie du respect de certains engagements par les associés, en particulier le rachat de leurs parts sociales.
Cette dernière obligation n’ayant pas été exécutée, les héritières soutenaient être titulaires, à l’égard de la SARL et des associés survivants, d’une créance au titre du rachat de leurs parts sociales. Elles ont donc saisi un juge de l’exécution qui les a autorisées, par trois ordonnances, à pratiquer des saisies conservatoires de droits d’associés et de valeurs mobilières au préjudice de la SARL et des deux associés.
Contestées, les trois ordonnances font l’objet d’une rétractation par les juges du fond qui ordonnent également la mainlevée de l’ensemble des saisies conservatoires pratiquées à l’encontre de la SARL et de ses associés.
Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation affirme qu’il résulte de la combinaison des articles L. 223-13 et L. 223-14, alinéa 3, du Code de commerce ainsi que de l’article 1843-4 du Code civil, que l’héritier d’un associé décédé, dont la demande d’agrément en qualité d’associé au titre des parts transmises a été rejetée, peut, à tout moment, renoncer à cette demande et exiger le remboursement de la valeur de ses droits, même après la fixation du prix par l’expert.
Les associés survivants qui ont refusé d’agréer l’héritier comme associé et qui ont sollicité la désignation judiciaire d’un expert aux fins de déterminer la valeur de ses parts sociales sont, à l’issue du délai légal, tenus d’acquérir ou de faire acquérir ces parts au prix fixé par l’expert lorsque l’héritier a renoncé à sa demande d’agrément.
Référence de l’arrêt : Cass. com. du 24 janvier 2024, n° 21-25.416.