Intégration fiscale : du nouveau sur les abandons de créances et la quote-part de frais et charges sur les cessions de titres de participation.
Intégration fiscale : du nouveau sur les abandons de créances et la quote-part de frais et charges sur les cessions de titres de participation.
Paru le 31.10.2018
Par Laurent Mathély, Avocat fiscaliste of Counsel, Lexton Avocats
Si le projet de Loi de finances pour 2019 ne comprend pas, à ce stade de la discussion, de réformes très significatives, il contient son lot habituel de mesures techniques et d’interprétation délicate. Comme souvent, depuis l’instauration du régime, l’intégration fiscale fait l’objet cette année d’un traitement particulier qu’il convient d’évoquer.
Il serait, en effet, notamment mis fin à certains dispositifs de neutralisation, dispositifs caractéristiques de l’intégration fiscale. Il s’agit tout d’abord de la fin de la neutralisation des abandons de créances, ou des subventions directes ou indirectes entre sociétés membres du même groupe fiscal.
On sait en effet, que dans le cadre de l’intégration fiscale, les discordances qui pouvaient exister entre les déductions fiscales opérées par les sociétés accordant des abandons de créances ou subventions, et d’autre part les profits taxables dans les sociétés bénéficiaires, étaient « neutralisées », et donc annulées au niveau du résultat d’ensemble du groupe. La fin de cette neutralisation, pour les exercices ouverts à compter du 1er Janvier 2019, est donc une mesure pénalisante et qui « représente un coût » comme le reconnait d’ailleurs l’exposé des motifs du projet de loi.
De même, et avec la même logique, il serait également mis fin à la neutralisation de la quote-part de frais et charges restant imposable à raison des plus-values sur cession de titres de participations au sein d’un même groupe, et bénéficiant du régime d’exonération. Cette quote-part est actuellement fixée à 12 %. Cette fin de la neutralisation, comme la précédente, représente également un coût pour les groupes concernés.
Ainsi, et pour tenir compte du coût de ces deux dispositifs, le texte prévoit, en contrepartie, de réduire la même quote-part de frais et charges sur cession de titres de participations, de 12 % à 5 %, et cela, pour toutes les entreprises, y compris celles qui ne font pas partie d’un groupe intégré. Il est important de signaler ce dernier point.
Il y aura donc des choix à faire avant la fin de l’année pour le rattachement des opérations à un exercice ou à un autre, compte tenu de la situation propre.
A noter par ailleurs que la fin des dispositifs de neutralisation, n’entraine pas pour autant la fin des dispositifs de « déneutralisation », c’est-à-dire de réintégration en cas de sortie de groupe ou de cession de titres hors groupe, pour les opérations neutralisées avant le 1er janvier 2019. Les obligations déclaratives sont d’ailleurs aménagées à cet égard.
L’ensemble du texte, qui semble pris dans un esprit de sécurité juridique, au regard de la conformité avec le droit de l’Union Européenne contient également d’autres ajustements de moindre importance.
Il conviendra donc de suivre attentivement l’évolution du texte avant son adoption définitive, sachant qu’en toute hypothèse, le régime des groupes fera, une fois de plus, l’objet de modifications significatives.
Contrôle fiscal : La nouvelle procédure d’examen de comptabilité «à distance»
Contrôle fiscal : La nouvelle procédure d’examen de comptabilité «à distance»
Paru le 22.02.2017
Contrôle fiscal : La nouvelle procédure d’examen de comptabilité «à distance»
Par Laurent Mathély, Avocat fiscaliste Of Counsel
Partant du constat de la généralisation des comptabilités informatisées dans les entreprises, le législateur vient d’instituer, et pour les seuls contribuables tenant leur comptabilité au moyen de systèmes informatisés, une nouvelle procédure de contrôle fiscal à distance, et donc sans intervention sur place du vérificateur.
Cette procédure, dite d’examen de comptabilité prévue à l’article L 13 G nouveau du Livre des procédures fiscales, s’ajoute donc à la procédure traditionnelle de vérification de comptabilité, et s’en distingue fondamentalement tout en en reprenant l’essentiel des garanties des contribuables et des prérogatives de l’administration.
En pratique, l’administration peut, depuis le 1er janvier 2017, adresser un « avis d’examen de comptabilité » à l’entreprise, celle-ci disposant alors d’un délai de 15 jours, pour lui adresser, sous forme dématérialisée, une copie du Fichier des écritures comptables (le FEC), document lui permettant donc d’effectuer tous les tris, classements, calculs et contrôles de concordance sans avoir à se rendre sur place. Il est rappelé que ce fichier devait d’ores et déjà être disponible et remis à l’administration dès l’engagement d’une vérification sur place.
L’administration disposera alors d’un délai de 6 mois pour envoyer une éventuelle proposition de rectification, ou aviser le contribuable de l’absence de rectification. L’absence d’envoi du FEC dans les délais peut conduire l’administration à annuler la procédure d’examen, et donc à engager une procédure de vérification de comptabilité traditionnelle. Une amende de 5 000 € est alors applicable.
Avec ce texte, l’administration dispose désormais d’un puissant instrument de contrôle permettant de multiplier le nombre de contrôles avec des moyens réduits. Il reste naturellement à voir comment en pratique ce nouveau droit sera utilisé et quels en seront les effets en termes de rendement.
Il est clair que si théoriquement cette procédure accroît significativement les possibilités d’investigation de l’administration, l’absence de venue sur place prive certainement le vérificateur de la possibilité d’examiner des documents ne relevant pas du FEC (factures, contrats, justificatifs divers) et qui auraient été utiles à des investigations poussées.
L’impossibilité pour l’administration de procéder à une vérification de comptabilité pour une période ayant déjà fait l’objet d’un examen de comptabilité, risque donc de priver celle-ci d’un moyen d’investigation plus efficace.
Par ailleurs, les garanties traditionnelles de la vérification étant applicables, notamment la fameuse obligation d’un dialogue oral et contradictoire en cours de contrôle, on voit mal les conditions dans lesquelles le respect de ce droit pourra être apprécié. Cela suppose que l’administration puisse établir qu’elle a offert au contribuable une possibilité de dialogue. La voie semble donc ouverte pour de nombreux contentieux futurs en la matière.
Il est probable qu’en pratique la procédure ne soit utilisée que pour les TPE et PME, avec également la possibilité d’un examen limité à un seul exercice en guise de « test », une vérification de comptabilité pouvant alors être engagée sur les autres exercices non prescrits et non examinés.
On attend donc avec impatience les premiers retours d’expérience sur cette procédure originale et contraignante, des contribuables « en examen ».
Contrôle du Crédit d’impôt recherche (C.I.R.) : Nouveaux droits effectifs depuis le 1er juillet 2016
Contrôle du Crédit d’impôt recherche (C.I.R.) : Nouveaux droits effectifs depuis le 1er juillet 2016
Paru le 21.07.2016
Par Laurent Mathély, Avocat fiscaliste Of Counsel
Afin d’améliorer les relations entre les contribuables et l’administration, en cas de contrôle fiscal portant sur le Crédit d’impôt recherche, la loi de finances rectificative pour 2015 avait institué un Comité consultatif du Crédit d’impôt pour dépenses de recherche. Cette disposition était passée relativement inaperçue, sans doute à cause de son effet différé. En effet, la saisine de ce Comité n’est recevable que pour les propositions de rectifications adressées à compter du 1er juillet 2016.
Cette mesure est donc applicable depuis cette date.
Pour les nouvelles rectifications proposées en la matière, les contribuables pourront donc désormais saisir cet organisme consultatif.
Le mécanisme institué est, en tout point, similaire à celui des saisines déjà existantes pour les Commissions administratives des impôts, notamment la Commission départementale, ou nationale, des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaire. Le législateur a choisi de créer un nouvel organisme, plutôt que d’étendre le champ d’application de la compétence des Commissions existantes, pour des raisons liées à la complexité technique et la spécificité du mécanisme du CIR.
En application de l’article L 59 D du L.P.F. lorsque dans le cadre de la seule procédure de rectification contradictoire, un désaccord subsiste entre un contribuable et l’administration, sur des rehaussements portant <b>sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses</b> prises en compte pour la détermination du CIR, le litige peut être soumis pour avis au comité consultatif du crédit d’impôt pour dépenses de recherche sur demande du contribuable.
Le contribuable dispose alors d’un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l’administration à ses observations (imprimé n° <b>3926-SD</b>) pour demander, sous peine d’irrecevabilité, la saisine du comité consultatif.
Cette compétence est donc limitée à la réalité de l’affectation des dépenses à la recherche, et ne semble pas, le texte n’étant pas très explicite, viser plus généralement l’éligibilité des dépenses au mécanisme du CIR. Il reste à savoir quelle « dimension » prendront les avis de ce Comité, au regard des litiges qui lui seront soumis, en précisant bien que, comme pour les autres Commissions, la compétence est limitée :
– aux questions de fait, à l’exclusion des questions de droit ;
– aux faits susceptibles d’être pris en compte pour l’examen de cette question de droit sans trancher celle- ci.
On ne peut que se féliciter de la mise en place d’un tel organisme, même si en l’absence de tout précédent, on ne peut anticiper sur les avis qui seront rendus, ni même sur le type de débats qui s’y tiendront. On attendra avec intérêt les premiers retours d’expérience.
En pratique, s’agissant uniquement de propositions de rectification postérieures au 1er juillet, et pour lesquelles il faudra encore qu’un « désaccord » subsiste, les premières réunions de ce Comité ne vont pas être immédiates. On ignore également dans quel délai les premières affaires transmises seront traitées.
Par ailleurs, la compétence territoriale du Comité est nationale (pas d’instance départementale) son siège est donc à Paris.
On peut d’ailleurs se demander si, à terme, l’existence d’un seul comité pour la France entière, et cela quels que soient aussi bien le volume du litige que la taille de l’entreprise, ne posera pas des problèmes de délai de traitement des dossiers.